Tais-toi et écoute

En tant qu’hypnothérapeute, j’ai longtemps eu le sentiment de devoir faire pour l’autre.

L’hypnose est souvent décrite comme une thérapie brève, un moyen pour changer rapidement…

« Arrêter de fumer en une séance seulement” « perdez 10 kilos avec ces 3 audios d’autohypnose” “Prenez confiance en vous, pack de 3 séances”

Mouais…

Dès le début de ma pratique j’ai ressenti une sorte de pression du résultat. Il faut que mes client·e·s changent rapidement pour atteindre au plus vite leurs objectifs .

Au fond, je crois que ça sonnait déjà faux avec ma vision de l’accompagnement et mes valeurs.

Quelle pression pour mes client·e·s et moi ! 

Et si, finalement, nous avions le temps ?

Le temps de se rencontrer, de créer un lien de confiance, d’accueillir. Sans vouloir faire maintenant et tout de suite.

Ça parait évident et logique pour certain.e.s, je sais !

Mais pour les jeunes praticien·ne·s , difficile de faire le tri entre les injonctions liées à l’image de l’hypnose, ce que l’on s’imagine devoir faire pour rentrer dans une case et l’accompagnant·e que l’on souhaite vraiment être.

Je crois qu’outre l’assurance et l’expérience qui vient avec le temps, le fait d’être aujourd’hui spécialisée m’a énormément aidée . J’ai la sensation que maintenant les gens ne viennent plus seulement me voir pour l’hypnose mais surtout pour l’accompagnante que je suis.

C’est beaucoup plus simple pour moi de poser mon cadre : “Nous avons le temps”.

La libération de la parole comme outil de changement

J’ai pourtant en face de moi des personnes en grande souffrance qui attendent souvent une grossesse depuis plusieurs années, des fausses couches et autre trauma.  Il est facile d’imaginer la pression et l’attente quand je les rencontre pour la première fois.

Mais justement, je m’aperçois que ces personnes ont aussi et surtout besoin d’être accueillies et écoutées avant de faire de l’hypnose.

Elles ont un vécu, une histoire qu’elles n’ont parfois jamais pris le temps ou eu l’occasion de raconter, de déposer. Elles enchaînent les rendez-vous médicaux avec des praticien·ne·s qui n’ont pas le temps de les écouter. 

Notre rôle est aussi de leur laisser l’espace et l’opportunité de se confier, enfin.

À vouloir trop faire pour l’autre, je crois que l’on en oublie l’autre.

Dans ma pratique (aka l’accompagnement des personnes qui rencontrent des problématiques de fertilité) je vois les personnes en moyenne 5 séances.

La vérité c’est que je passe la première séance à écouter. 

Je ne fais pas ou très peu d’hypnose en tant que tel ce jour-là. 

Je sais que pour certain·e·s professionnel·e·s c’est limite honteux, une aberration pour d’autres, de ne pas faire d’hypnose lors d’une séance alors que l’on se dit hypnotherapeute, praticien·ne en hypnose.

Au début, voulant rentrer dans ce cadre là, je me forçais à faire un petit truc hypnotique à la fin souvent, pour m’acheter une bonne conscience et ne pas assumer ce qui était important pour moi et ma pratique. Et quand je ne le faisais pas je me sentais imposteuse au lieu de me concentrer sur la magie qui s’était opérée lors de cette première rencontre.

Mais aujourd’hui je m’en fou en fait parce que ce qui est important, c’est ce qu’en dise mes client.e.s et comment je me sens alignée dans ma pratique.

Ce que j’entends souvent après cette séance c’est :

“Notre dernière séance m’a fait tellement de bien”

“personne ne m’a jamais autant écouté.e »

“j’ai jamais raconté ces choses là à personne avant vous”

“je me sens beaucoup plus légère, délivrée »

« c’est fou ça a déjà changé »…

Et oui le plus magique dans tout cela c’est que bien souvent le changement apparaît déjà, que le lien de confiance et une relation solide se sont construits c’est tout bénef’ pour la suite.

Etre alignée dans sa pratique

En fonctionnant de la sorte, je respecte aussi l’accompagnante que je suis. 

J’ai besoin de ne plus être acculée par la pression du résultat. J’ai besoin de ressentir l’autre, de l’entendre, de le voir pour l’accompagner au mieux.

Le lien de confiance est alors à double sens.

La vérité c’est qu’en entendant l’autre je peux aussi reconnaître ses mécanismes, entrevoir les portes à pousser, ressentir les émotions qui s’expriment… Et cela m’est extrêmement utile pour la suite.

Et comment fait-on ?

Évidemment il existe des outils pour éviter d’être dans un “small talk”  inintéressant comme l’écoute active, le clean language et bien d’autres encore.

Mais le plus important pour moi est de rester dans une posture d’accueil qui permet à l’autre d’avoir toute sa place pour ÊTRE.

Et toi, tu en penses quoi ?